Chronique|

La ville qui plantait des arbres

Pricila Martinez, Paula Raquel, Dos Santos, Danielle Hunnisett, Natalie Gibb et Jean-Maxime Lemerise ont décidé de prendre en main le reverdissement de leur quartier.

CHRONIQUE / L’arbre était à l’honneur cette semaine à la Ville de Gatineau, alors que des organismes proposent d’investir 1 % du budget d’infrastructures dans le reverdissement des quartiers.


Concrètement, si les élus acceptaient d’embarquer dans une telle aventure, cela voudrait dire que Gatineau « sacrifierait » un demi-kilomètre d’asphalte chaque année pour planter 2000 arbres à la place.

C’est pas beau, ça ?

Qui peut être contre une idée pareille à l’ère de Greta Thunberg ?

Surtout qu’on sait que plus d’arbres en milieu urbain réduisent les îlots de chaleur, améliore la qualité de l’air, aide à contrôler le ruissellement… En plus, c’est joli. Un grand arbre attire les oiseaux, favorise la biodiversité, donne de la personnalité à une rue…

Pourtant, les élus de Gatineau ont accueilli la proposition avec prudence. Et vous savez quoi ? Je les en félicite. Parce que cette proposition, qui semble si attrayante sur papier, est difficile à mettre en œuvre.

Qu’on se souvienne du fameux programme des 100 000 arbres de l’ex-maire Marc Bureau. Une fois élu à la mairie en 2005, il avait tenu et même surpassé sa promesse électorale.

Selon le bilan officiel, Gatineau a planté 182 759 arbres entre 2006 et 2009. En estimant le taux de survie à 75 %, c’est donc un total de 137 000 arbres qui se seraient ajoutés à la canopée urbaine durant le premier mandat de M. Bureau.

Sauf que ce ronflant bilan avait été mis à mal quelques années plus tard.

En 2012, un étudiant en maîtrise de l’environnement de l’Université de Sherbrooke, Simon Saint-Pierre, est allé vérifier sur le terrain si les arbres avaient survécu. Il avait échantillonné une quinzaine de sites de plantation. Pour conclure que le programme était un échec monumental… Sur 6724 arbres plantés par la Ville de Gatineau, il n’avait pu en retracer que 298. Un taux de survie d’à peine 5 %.

Comme quoi il ne suffit pas de planter des arbres. Il faut choisir les bonnes essences, les planter dans le bon type de sol, et les entretenir pendant les premières années de leur fragile existence. Sans compter les « pandémies » comme l’agrile du frêne qui peuvent dévaster une canopée urbaine en quelques années…

Dix ans après le programme des 100 000 arbres, on peut aussi se demander où ils ont été plantés, ces fameux arbres. Pas dans les quartiers pauvres de Gatineau en tout cas. Si on se fie à une récente cartographie du couvert forestier réalisée par le CREDDO, ce sont les quartiers défavorisés qui manquent le plus de parcs, d’arbres et d’ombre. Une iniquité environnementale qui reste à corriger.

Dans Wrightville-Saint-Jean-Bosco justement, un petit groupe de citoyens a décidé de prendre en main le reverdissement du quartier.

Les gens étaient invités à nous dire pourquoi ils voulaient un arbre.

Eux aussi ont constaté que replanter des arbres n’est pas si simple qu’il n’y paraît. Ils ont décidé de commencer modestement, mais de faire les choses comme il faut.

De concert avec la maison de quartier Action-Quartiers, ils ont obtenu une subvention de 1000 $ qui leur a permis d’acheter une douzaine d’arbres d’environ un mètre de grandeur. Puis ils ont distribué un dépliant dans le quartier invitant les résidants à « adopter » un arbre.

Mais avant de distribuer les arbres, le comité voulait s’assurer que les plants allaient tomber entre de bonnes mains. Qu’ils seraient entretenus, chéris, arrosés avec amour…

« Les gens étaient invités à nous dire pourquoi ils voulaient un arbre. Après, nous nous sommes présentés chez eux avec un arboriste afin de discuter de leurs motivations, de leurs besoins, et vérifier si le terrain se prêtait à la plantation d’un arbre », explique Danielle Hunnisett, une des citoyennes impliquées.

Chaque candidat à l’adoption devait s’engager à entretenir son arbre pour au moins les deux premières années. La plantation commence ce samedi. Une bien belle initiative. Elle démontre l’importance de bien faire les choses afin d’atteindre un taux de survie acceptable…