Tribune. Décembre 2019, réforme des retraites, grève dans les transports. Des millions de citadins qui empruntaient d’ordinaire le métro remontent à la surface, créant l’embolie immédiate dans les rues, avec la cohabitation souvent « nerveuse » des voitures, scooters, piétons, vélos et autres trottinettes.
Mars-avril 2020, premier grand confinement de l’histoire. Des millions d’urbains ressentent dans leur chair le manque d’espace et de vie sociale, et donc l’importance de l’espace public et de ses parcs, jardins, rues, places, cours, quais et promenades.
Eté 2020. La France découvre l’« urbanisme tactique », avec ses rues piétonnisées, ses pistes à vélos temporaires, ses terrasses de cafés qui débordent généreusement sur la rue et les places de stationnement.
En moins d’un an, nous avons fait l’expérience sensible d’une transformation quasi instantanée de nos villes, capables d’adapter leur métabolisme sous contrainte.
Nos villes ont montré leurs limites, mais aussi leurs opportunités : elles sont peut-être plus malléables que nous le pensions. Depuis l’après-guerre, l’automobile a structuré l’espace urbain et a connu soixante ans de règne à peu près incontesté : on dessinait des routes, et les autres usages étaient relégués à l’espace qu’on leur laissait. Soudain, tout change. Avec le recul inéluctable de la voiture en ville, quelques millions de mètres carrés d’espaces publics vont se libérer dans la décennie à venir. C’est un fait majeur dans l’histoire de nos cités.
Nouvelle conquête
L’enjeu n’est pas une répartition arithmétique des mètres carrés selon les usages. L’espace public, c’est vraiment là où la vie se joue en commun ! Et donc il est fondamental que cette question soit un vrai débat de société. En particulier dans un pays où la question sociale est aussi vive.
L’espace public appartient à tous, mais c’est parce qu’il est un bien commun qu’il est tout sauf neutre. Chaque mètre carré récupéré sur la voiture sera l’occasion d’un débat entre les différents usages possibles et les visions du monde afférentes. Les nouvelles formes d’occupation de l’espace public sont une véritable opportunité d’enrichissement de l’espace social. Et il est évident que dans les évolutions à venir, le citoyen, historiquement écarté des décisions, aura son mot à dire.
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